·  Rabbi Nahman de Breslev est l'un des penseurs les plus éminents et les plus originaux du monde hassidique.

Même aux premières générations du hassidisme, quand ce mouvement suscita une renaissance spirituelle au sein du peuple juif et y fit surgir des dizaines de personnalités de premier plan, bien peu parvinrent à la stature spirituelle, à la force et à la profondeur de la pensée de Rabbi Nahman de Breslev.

Pendant sa courte vie, qui fut continuellement en butte à des souffrances physiques et morales, il réussit même à écrire quelques chefs-d'oeuvre et à constituer un groupe de hassidim qui sont restés fidèles à son enseignement et à sa personnalité jusqu'à ce jour, plus de cent cinquante ans après sa mort. En dépit des changements historiques et des modifications dans son expression, l'héritage spirituel de Rabbi Nahman garde un Intérêt vital et il a autant de signification pour la postérité qu'il en eut pour ses contemporains.

Les hassidim de Rabbi Nahman se sont efforcés autant que possible de conserver les souvenirs de son enseignement, de sa façon de vivre et de ses propos. Les paroles qu"il rédigea de sa main, celles qu'ils dicta à ses disciples et celles qui furent consignées par écrit d'après ses propos constituent ensemble un tableau frappant, reflet d'une grande personnalité et d'un enseignement aussi puissant qu'original.


·  La vie de Rabbi Nahman

Rabbi Nahman naquit le 1er Nissan 5532 (1772) dans la ville ukrainienne de Mezhibozh. Son père, Rabbi Simhah, était le fils de Rabbi Nahman de Horodenka, une des grandes figures du début du hassidisme, érudit et prédicateur qui fut l'un des plus éminents disciples du fondateur du hassidisme, Rabbi Israël Ba'al Shem Tov. Du côté de sa mère, Feige, Rabbi Nahman descendait du Ba'al Shem Tov en personne et ses oncles maternels, Rabbi Moshe Haïm Efraïm de Sedilkov et Rabbi Barukh de Mezhibozh furent eux-mêmes d'importants chefs hassidiques.


Dès sa plus tendre enfance, Rabbi Nahman se distingua par son caractère et ses qualités. Il avait une aptitude spirituelle éclatante et dès sa jeunesse il se signala par sa perspicacité et, mieux encore, par son érudition. Malgré sa vivacité et sa turbulence, il était pénétré d'une profonde crainte de Dieu. On rapporte qu'étant enfant il rougissait de honte devant le Saint béni soit-il quand il pensait avoir fait quelque péché.


Comme le voulait alors la coutume, il fut marié à l'âge de quatorze ans et il alla s"installer chez son beau-père dans un petit village proche de la bourgade de Medvedivka. Pendant les cinq années qu'il passa dans le village, il se consacra essentiellement à l'étude de la Torah et à la prière. Déjà certaines personnes commençèrent à se joindre à lui, attirées par sa personnalité, et elles firent de lui leur maître et leur guide. A l'approche de sa vingtième année, il déménagea dans une bourgade et nombreux furent ceux qui virent en lui un chef hassidique. Dès cette époque, sa démarche s'avéra originale et spécifique, irréductible à celle de la plupart des grands représentants du hassidisme. Du fait de son jeune âge et, en outre, des critiques virulentes qu'il émit à l'encontre des gens importants, il s'attira de plus en plus d'ennuis qui dégénérèrent en une controverse acharnée.


En l'an 5558 ( 1798) , il décida soudain de partir pour Erets Israël . Durant toute son existence il concentra ses pensées sur Erets Israël et il y voyait un pôle d'attraction spirituelle.Il ressentit l'obligation de mener à bien ce que son arrière-grand-père le Besht ( Baal Chem Tov ) avait tenté sans succès : se trouver effectivement en Terre Sainte. Pour ce faire, il quitta et abandonna quasiment sa famille et il se mit en route en compagnie de son premier disciple qui, durant toute son existence, resta son fidèle serviteur. Passant par Odessa et Constantinople il parvint en Erets Israël. Ce voyage fut semé de difficultés, d'aventures et d'évènements mystérieux. Toutes les dificultés matérielles et spirituelles qui se produisirent pendant leur odyssée sont retracées dans un petit livre de récits écrits par son compagnon de route .Rabbi Nahman tenait à voyager incognito et cela lui valut d'être en butte à divers soupçons. Ses tourments spirituels qui se manifestèrent sous des formes bizarres ne firent qu'accroître le mystère et l'étrangeté qui planaient autour de sa personne. En outre son voyage coïncida avec le moment où Napoléon arriva en Erets Israël pour enlever le pays aux Turcs. Rabbi Nahman parvint à destination et il resta là-bas quelques mois, essentiellement à Tibériade et à Safed. Après des aventures incroyables ( parmi lesquelles il faut signaler son emprisonnement par les Turcs et sa libération grâce à la rançon payée par la communauté juive de Rhodes ), il revint chez lui.


Au commencement de l'année 5559 ( 1799 ) il partit s'installer dans la ville de Zlatopoli où il résida pendant environ deux ans. Dans des circonstances encore obscures , il s'attira l'inimitié de Rabbi Aryeh Leib, l' " aïeul de Shpoly ", qui habitait la ville voisine. Cette controverse et celles qui s'en suivirent se prolongèrent durant tout le reste de ses jours et lui occasionnèrent en tout lieu de grandes souffrances. Ses hassidim et lui-même furent persécutés par un grand nombre d'éminents chefs hassidiques; après sa mort, ces persécutions se reportèrent sur ses disciples et persistèrent pendant des générations; dans certains endroits elles se traduisirent par des excommunications. On accusa notamment Rabbi Nahman de superbe, de pseudo-messianisme, de propension à l'hérésie ( sabbatéenne et frankiste ) et d'autres choses encore. Bien que Rabbi Nahman évitât toujours de se laisser aller activement au jeu de la polémique et qu'il fût soutenu par son puissant oncle, Rabbi Barukh de Mezhibozh, par le Voyant de Lublin ( qui approuva son livre ) et par Rabbi Shneor Zalman de Liady, l'opposition qui se déchaîna contre lui et contre son enseignement ne désarma pas. Les chefs hassidiques qui l'appuyaient ne se trouvaient pas dans son entourage immédiat et ils étaient suffisamment occupés par leurs propres problèmes et par leurs propres luttes avec les adversaires du hassidisme: ils ne purent donc pas soutenir réellement Rabbi Nahman.


En l'AN 5562 ( 1802), Rabbi Nahman s'installa dans la grande ville de Breslev où il passa quelques années et où il produisit l'essentiel de son oeuvre sprituelle. Là se joignirent à lui plusieurs de ses disciples les plus éminents. C'est à Breslev qu'il endura plusieurs malheurs dans sa vie personnelle: il perdit sa femme, plusieurs de ses enfants moururent, parmi lesquels son jeune fils qu'il chérissait tout particulièrement et en qui il plaçait ses espoirs et les espoirs de la génération suivante. C'est là enfin qu'il contracta la phtisie à laquelle il devait succomber.

En l'an 5570, il déménagea à Uman en sachant qu'il devait y mourir. Il y passa ses derniers jours jusqu'à sa mort le 18 Tichri 5571 ( 1810 ).


Avec l'aide de D..., d'autres textes se rapportant à la vie de ce grand maître du Judaïsme, seront rajoutés à celui qui précède, lors d'une prochaine mise à jour.